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Christophe Pauly

L’étoilé à emporter? Au Coq aux Champs, c’est possible (et c’est plus que réussi)

Alors que les températures piquent du nez et qu’il y a déjà comme un goût de fêtes de fin d’année, on a profité de la généreuse proposition de Christophe Pauly, chef* du Coq aux Champs, pour célébrer les fêtes avant l’heure et tester son menu à emporter, disponible pour la Noël et la Saint-Sylvestre. Au menu ? Générosité, gourmandise et dolce farniente.

Si on ne présente plus le chef Christophe Pauly (une étoile Michelin, Chef de l’année 2021 Gault et Millau, où il a la cote de 17,5/20 ), on se laisse malgré tout toujours aussi agréablement surprendre par l’inventivité de sa cuisine, la convivialité de son restaurant et ses déclinaisons parfois insoupçonnées. Ainsi en va-t-il de son « take away » du week-end, une formule à emporter que le Coq aux Champs décline depuis maintenant 23 ans. Popularisée durant la crise COVID, c’est aujourd’hui devenu une spécialité de la maison.

Une approche insolite et décomplexée de la gastronomie, et l’occasion pour tout un chacun de jouer les maîtres d’hôtel le temps d’une soirée.

Christophe Pauly

Comme des Coqs en pâte

Sans surprise, la formule a ses habitués tout au long de l’année, avec certaines personnes qui viennent même chaque semaine. Mais elle ne fonctionne jamais mieux que durant les fêtes, auxquelles le chef consacre un menu spécifique pour les 24 et 31 décembre. Une idée qui permet de profiter de la chaleur des fourneaux d’un étoilé autant que de l’âtre de sa cheminée, qu’elle soit réelle ou métaphorique.

Le meilleur des deux mondes ? Une certaine idée du bonheur en tout cas, sourit Christophe Pauly, qui nous glisse complice et sûr de son coup, que la formule à emporter du Coq aux Champs est faite pour garantir un max de plaisir aux convives avec un minimum de contraintes.

« Après plus de vingt années à faire de l’emporter, on sait ce qui fonctionne et ce qu’il vaut mieux éviter. La formule est pensée pour n’avoir besoin que d’un four et d’un minimum de vaisselle » assure-t-l.

Une proposition garantie sans stress, des mises en bouche au dessert, même si pour être vraiment réussie, elle nécessite toutefois quelques compromis. Si l’emporté s’inspire évidemment du style de la maison et de ses produits d’exception, le chef ne prétend pas répliquer la magie qui opère au restaurant, et dont il revient à chacun d’interpréter sa propre déclinaison à la maison.

« Dans l’assiette, c’est l’ADN du Coq aux champs. Mais ce n’est évidemment pas une cuisine de l’instant, puisque tout a été pensé au prisme de la facilité, du transport à la préparation, pour un menu que l’on vient chercher en soirée et que l’on peut même déguster le lendemain ».

On l’aura compris, un menu étoilé à emporter est un repas qui s’écrit à quatre mains, raison pour laquelle le Chef ne propose pas d’emblée une sélection de vins. Une manière élégante de passer la main (ah !) aux nombreux cavistes de la région, qui se feront un plaisir de vous conseiller, mais aussi d’encourager les œnologues amateurs à aller puiser dans leurs propres caves, souvent bien garnies. « Si on me le demande, je donne volontiers des conseils, et je veux évidement bien proposer une sélection, mais ce que j’observe, c’est que certains de nos clients ont une (très) belle cave à la maison, et sont souvent heureux de jouer les sommeliers à domicile ».

Les petits plats dans les grands

Le décor est planté, et les précieux sacs ont été récupérés au Coq aux Champs. Pour ce qui est de la mise en place de ce menu de fêtes à emporter, à chacun son style. Et si on peut à peu de choses prêt déguster ces mets à même leur contenant en carton pensé pour être réchauffé tel quel, on choisit pour notre part de mettre les petits plats dans les grands. On sort la vaisselle de grand-mère, les verres en cristal, la bougie de circonstance et on se plonge dans le menu et dans l’ambiance.

Au programme ? Des produits nobles dans une déclinaison qui fait la part belle au plaisir et à la gourmandise. Saumon fumé, homard bleu, Saint-Jacques, truffe, poularde… Autant de stars de saison qui mettront tout le monde d’accord, et qui permettent de briller par leur élégante simplicité, sans mises en œuvre technique qui viendrait briser la convivialité de la soirée. On réchauffe et on déguste, point. Tout juste si ici ou là, il y a une fantaisie croustillante à saupoudrer au dernier moment. On est là pour pro-fi-ter qu’il a dit le chef, qui a tout pensé pour.

Et en bouche, ça donne quoi ?

Hédonisme comestible

On commence (très) fort avec un berlingot de saumon fumé au feu de bois, daikon et raifort, exquis d’efficacité. Avalé en une (ambitieuse, certes) bouchée, il remplit à merveille son rôle de mise en bouche, au sens propre du terme : sa fraîcheur légèrement acidulée vient titiller les papilles et éveille le palais au festin à venir. Quant à la brioche à la fleur de sel accompagnée de beurre Bordier ? Peut-être était-elle prévue pour nous accompagner tout au long du repas, qui sait. Ce qui est certain, c’est qu’elle n’aura pas fait long feu à table, la pauvre.

De « l’hédonisme comestible », voilà la seule manière de décrire ce coussin moelleux, dûment réchauffé sur les conseils du chef du Coq aux Champs. Et sur lequel ce beurre à la sensualité indécente (pensez à BB dans Et Dieu créa la femme, d’ailleurs ce sont aussi les initiales de « beurre Bordier », comme par hasard) ne demande qu’à se prélasser. Ça commence bien. Très très bien, même.

Un éternel été

En première entrée, un salpicon de homard judicieusement accompagné de « tomates de l’été dernier » goûte pile ce qu’on se figure qu’un après midi passé à lézarder au mythique Hôtel Pellicano doit goûter. C’est sexy, raffiné, ensoleillé. Et après avoir dûment saucé son assiette, il est impossible de s’imaginer préparer un guacamole sans l’agrémenter d’une touche aussi surprenante qu’élégante d’estragon.

La barre est haute quand les Saint-Jacques barbotant sur leur joli velours de potimarron arrivent à table. Pour celles et ceux qui ont la chance d’avoir une certaine expérience du monde de la gastronomie, on est sur une association « classique » de saison. Comprendre, elle ne surprend pas forcément, mais elle ne déçoit certainement pas non plus. Voire même, son généreux velours orangé donne la délicieuse illusion de faire le plein de légumes et de vertu plutôt que bonne bombance.

Confort et réconfort

Avec une assiette comme celle-ci, on pourrait (mesquinement) reprocher au chef d’avancer en terrain conquis et de jouer la carte plutôt safe du réconfort gustatif, mais justement, est-ce que ce n’est pas au fond pile ce qu’on attend d’un menu étoilé qu’on peut savourer en pyjama si le coeur nous en dit ?

Et le réconfort se poursuit avec le plat principal, un marbré de volaille de Bresse, vin jaune et morilles, qui n’est rien si pas la quintessence du plat de fêtes. Couronnée d’un diadème comestible de châtaignes rehaussées de feuille d’or, la volaille se pavane dans l’assiette et le Coq enchante. Sa sauce, d’un brun rehaussé de perles scintillantes de (bon) gras est une leçon en la matière, et la deuxième brioche, gardée expressément pour elle, lui fait honneur, sa mie ne demandant qu’à s’imbiber de chaque goutte de saveur.

Délicieux souvenirs

Comme les meilleurs plats de fête, celui-ci passe directement de la bouche au coeur. Et évoque les savoureux souvenirs de grands-mères férues de cuisine, qui n’aimaient rien tant que de mettre les petits plats dans les grands. D’autant que vu qu’il y a zéro préparation à faire, juste des cuissons à lancer, on a plein de temps pour jouer au jeu des Noëls d’hier.

En dessert, le « pot de ouf » bien connu des habitués du restaurant serait presque indécent si sa gourmande sensualité n’était pas si assumée. On regrette peut-être qu’il n’y ait pas plus de contraste de textures, et on aurait aimé avoir un shortbread écossais à émietter par-dessus. Mais niveau superposition des goûts ? C’est un sans faute. Ainsi qu’un succulent rappel que les marrons glacés sont une des stars sucrées de la saison. Le financier aux amandes est quant à lui parfait comme épilogue en accompagnement d’un espresso, avec un parfum d’amande bien présent, comme un dernier câlin aux papilles après ce festin.

De (vraiment) bonnes fêtes

Désireux de faire preuve d’une certaine forme de sobriété malgré cette débauche d’ingrédients précieux, on a savouré le menu avec un pairing maison sans alcool, entre Rish à la lavande à l’apéro et Riesling prestige 0 de chez Noovi avec le repas. Et on vous recommande d’en tenter votre propre version à la maison. Cela nous a en effet permis de ne pas surcharger nos foies, et de finir le repas avec le sentiment exquis d’avoir (vraiment) bien profité, sans pour autant avoir abusé des bonnes choses.

Avoir la gueule de joie, quoi, et célébrer tout le talent de l’équipe du Coq aux Champs en pleine conscience. Si d’aventure, notre compte-rendu devait vous avoir donné faim, et l’envie de commander vous aussi ce menu à emporter étoilé : bon appétit. Vous allez vous régaler, promis.

Lire aussi : Avec son Om, le chef Olivier Massart atteint la note juste

Le Coq aux Champs à emporter

Rue du Montys 71, 4557 Tinlot – lecoqauxchamps.be

Menu proposé au prix de 85 euros par personne. Commande uniquement par téléphone au 085 51 20 14. Menu de Noël à commander sous réserve de disponibilité jusqu’au 20 décembre midi. Pour le Nouvel-An, les commandes sont ouvertes sous réserve de disponibilité jusqu’au 27 décembre midi.

Enlèvement des menus à emporter au Coq aux Champs (pas de livraison possible), le 24 décembre de 9h30 à 12h00 et le 31 décembre de 9h30 à 12h00.

Clément et Kathleen Jadot sont le genre de couple qui peut finir (et même commencer) les phrases de l'autre, mais parce que ça peut vite devenir pénible, ils mettent plutôt leur compatibilité au service de la rédaction commune d'articles. Ensemble, ils ont : un chien, un chat et un nombre incalculable de livres.