Grosse baise, notre enquête exclusive sur la drague (et le sexe) à Liège
Connue comme la Cité ardente, Liège ne doit pas tant ce surnom à son climat caliente ou à son histoire bouillonnante qu’au caractère passionné et passionnel de ses habitants. Véritable Vérone du Nord, c’est dans le 4000 que les couples se font et se défont, tandis qu’amoureux transis et amants torrides aiment s’y retrouver, pour un soir ou pour la vie. Une attractivité animale, mâtinée de la convivialité et de l’accent fleuri qui valent aux Liégeoises et aux Liégeois la réputation d’être, de tous les peuples de la Gaule, les plus chauds. Entre mythes et réalité, enquête au corps-à-corps.
Que vous soyez plutôt volage ou sédentaire, si vous êtes actuellement « sur le marché » ou si vous l’avez été au cours de ce millénaire, impossible de ne pas avoir remarqué que depuis le bug de l’an 2000, le paysage amoureux s’est reformaté. Confinement, applications de rencontre en ligne, libération des paroles LGBTQIA+ ou encore phénomène #MeToo, la drague au XXIe siècle est parfois bien éloignée de ce qu’en montraient les comédies romantiques à succès des 90s, pas forcément préoccupées par des concepts aussi cruciaux que le consentement, entre autres. Et si certains changements de fond ont retourné le terrain des relations, ils n’ont pas déraciné pour autant une série de pratiques séculaires – pour le meilleur, mais aussi pour le pire, et Liège n’est évidemment pas épargnée.
Pour mieux comprendre les dynamiques changeantes des relations amoureuses dans le quatre mille, nous avons interrogé les lecteurs de SIROP et de Boulettes Magazine sur leurs affaires de cœur et de mœurs, en les invitant à répondre à notre enquête Grosse baise. Objectif avoué : fournir un panorama détaillé de la romance en Cité ardente, et déterminer au passage si elle est vraiment si chaude que ça.
Notre enquête : 329 personnes domiciliées en province de Liège ont répondu anonymement à notre enquête. 91,5% des répondants ont entre 18 et 44 ans, le reste des sondés allant des moins de 18 ans (1%) aux 45-54 ans (4%) en passant par les plus de 65 ans (1,5%). 62,9% des répondants se disent attiré.e.s par les hommes, 19,7% par les femmes et 10,2% par les deux sexes. 64% d’entre eux sont en couple (dont 81,5% depuis plusieurs années), 29,8% sont célibataires, et le reste qualifie son statut relationnel de « compliqué ».
Je t’aime, moi non plus
Non, Liège n’est pas une ville romantique. C’est ce qu’affirme la majorité des Liégeois interrogés (61%), qui trouvent la ville sale et cabossée par des années de chantiers à tout va, et déplorent un manque d’entretien et un sentiment d’insécurité. Une morosité ambiante face à laquelle certains spots semblent toutefois trouver un peu de répit, coteaux de la Citadelle, bords de Meuse et ruelles pavées en tête.
- « Elle l’était, mais malheureusement plus maintenant »
- « Les travaux du tram c’est pas très glam »
- « La romance rime plus avec la douceur et la sécurité, or il y a peu d’endroits à Liège où je me sens en sécurité dans l’espace public »
Des griefs qui sont devenus monnaie courante depuis plusieurs années, mais qui n’empêchent pas une minorité de répondants (39%) de préférer voir le verre à moitié plein, tout en invitant à regarder aussi un peu plus loin. Par exemple, du côté des nombreux petits établissements indépendants qui font selon eux le charme de la Cité ardente.
- « Il y a beaucoup de petits endroits sympas pour boire un verre ou manger »
- « De prime abord, si la ville n’est pas très accueillante ou belle, elle regorge de petits coins, de petits bars ou de restaurants aux aspects cosy et romantiques »
- « Il y a plein de petits endroits sympas, les ruelles, les impasses, les terrasses, les jardins… des bons spots pour regarder les couchers de soleil, les étoiles et les panoramas de la ville la nuit »
- « Qui peut résister à la Belle liégeoise qui donne l’impression de voguer sur un voilier ? »
Pas d’amour inconditionnel, mais plutôt un constat mi-figue mi-raisin pour la métropole liégeoise où, il faut bien l’avouer, ce n’est pas demain la veille qu’on verra les touristes traverser la Meuse en gondole, poussés par Tchantchès qui leur joue la sérénade tout en leur offrant une flûte de péket.
De là à dire que la ville manque de charme, c’est une autre paire de manches. Car si elle ne convainc que timidement les romantiques en quête de lune de miel, elle l’emporte en revanche haut la main chez celles et ceux qui cherchent encore l’âme sœur… Liège, romantique ? Non. Mais Liège, propice à la drague ? Un peu mon neveu !
Liège est-elle une ville propice à la drague ?
Les + :
- « Tout le monde est chaud »
- « Les gens sont ouverts »
- « Ça drague de tous les côtés »
- « Les Liégeois sont sociables, bons vivants, ils dialoguent très facilement »
- « Il y a une vie nocturne très active, ce qui favorise les moments où on peut se lâcher et oser passer en mode drague »
- « Le Carré est littéralement fait pour ça »
- « Il y a beaucoup d’endroits propices et de jolies filles »
- « Les Liégeois sont chaleureux et bavards »
Les – :
- « Il n’y a que des lourds dans le Carré »
- « Il y a trop de bobos et de gens pas intéressants »
- « C’est vite triste et déprimant. Au-delà de la guindaille, il y a peu d’activités où rencontrer des gens, donc on fait vite le tour »
- « Peu d’endroits calmes pour discuter »
- « L’environnement de la ville n’est pas sécurisant »
- « La ville est plutôt petite et tout le monde se connaît, on n’est jamais à l’abri de draguer des connaissances de personnes qu’on a déjà draguées ou plus »
- « On manque de petits restos sympas où aller sans réserver, ce qui ruine un peu la spontanéité »
Les meilleurs endroits pour rencontrer l’âme sœur…
- Les applications de rencontre
- Le Carré
- Les soirées chez des amis
- Les concerts
- Les parcs
Mais aussi le travail, les secondaires, le Chapi, le Marché de Noël, feu la bibliothèque des Chiroux (forever dans nos coeurs) et le XV août.
Les qualités qui plaisent le plus à Liège
- La gentillesse
- La fidélité
- L’honnêteté
- L’humour
- Le charisme
- Le respect
- L’ouverture d’esprit
- L’intelligence
- La bienveillance
- Le fun
Trop beau pour être vrai ? À la question « que recherchez-vous chez un.e partenaire potentiel.le », seule une poignée de nos 329 répondants a répondu « la beauté ».
Les principaux défis en matière de drague
- « Petite ville donc peu de choix »
- « La proportion (très faible) de bon grain dans l’ivraie » « Les mecs sont (presque) tous des charos »
- « Les plans cul priment sur les relations »
- « Toujours les mêmes têtes »
- « Liège est un grand lit : difficile de rencontrer quelqu’un qui n’est pas l’ex d’une connaissance »
On s’fait une baise ?
Pas besoin d’aller traîner du côté de la Boverie pour croiser des chaud-e-s lapin-e-s, ni de s’abonner à Netflix pour prendre des leçons de Sex Education. À Liège, ça drague ferme et ça ramène. Sur les 329 répondants de l’enquête, 90% sont sexuellement actifs, et parmi ceux qui croquent la pomme à pleines dents, 90% le font au moins une fois par mois.
Un constat où la qualité semble ici rejoindre la quantité. D’après notre enquête, le Liégeois médian donne la note de 8/10 à la qualité de sa vie amoureuse et 7/10 à sa vie sexuelle, tandis que 78% des répondants se disent sexuellement satisfaits à au moins 7/10, et plus de la moitié donne une note supérieure à 8/10 pour sa vie relationnelle. Distinction, voire Grande distinction donc pour la vie sentimentale et les ébats liégeois.
7/10, c’est la note que la majorité des Liégeoises et des Liégeois donnent à leur vie sexuelle
Le secret de cette félicité ? Nombreux sont celles et ceux qui semblent s’accorder sur ce qu’est une « bonne baise ». Pour la plupart des gens qui ont répondu à l’enquête, c’est avant tout être connecté à son ou sa partenaire. Prendre du plaisir en symbiose et en toute confiance. Recevoir et donner en échange. Vient ensuite le fait de s’autoriser à prendre le temps. Oublier les contraintes, s’échapper, mais ne surtout pas éliminer les préliminaires. C’est seulement après qu’arrive l’acte de jouir. Quant à la manière en tant que telle, elle semble bel et bien laissée à l’appréciation de chacun, que vous soyez en recherche de performances acrobatiques ou maître du tantrisme.
Côté fantasmes ardents, difficile de passer à côté de certains incontournables. Au-delà des extravagances propres aux uns et aux autres, c’est ainsi de loin le plan à trois qui l’emporte haut la main chez nos centaines de répondants. L’enfer, c’est les autres ? Fuck no!
Viennent ensuite les ébats dans un lieu public, puis une expérience avec une personne du même sexe. Et si on serait tenté de dire que, comme pour bien d’autres choses, ce sont ceux qui en parlent le plus qui en font le moins, on notera enfin que 53% des personnes interrogées déclarent pour leur part avoir déjà eu des rapports dans des lieux publics, et 19% des échanges avec plus d’un partenaire en même temps. Les désirs des uns sont la réalité des autres !
D’après notre enquête, une bonne baise, c’est…
- « Comme une danse, un truc intuitif où chacun doit être à l’écoute de l’autre, mais aussi de ses envies à lui »
- « Être soi, totalement libre, en symbiose avec le partenaire, donner du plaisir, et bien sûr prendre du plaisir »
- « De bons préliminaires »
- « Une baise qui prend son temps et pas toujours la même chose en 5 minutes »
- « Une connexion bestiale »
- « Un bon orgasme et un doigt dans le cul »
Pour toujours
Couple libre, polyamour ou trouple, alors que les multiples de deux foisonnent, les Liégeoises et les Liégeois ont-ils eux aussi renvoyé la monogamie au placard ? Quel que soit le nombre de partenaires qu’ils ou elles fréquentent, force est en tout cas de constater que plus de 85% d’entre eux considèrent la fidélité comme une valeur cardinale dans une relation amoureuse, tandis que seuls 2,7% ne la voient pas comme quelque chose de significatif, le reste des personnes interrogées apportant pour leur part des précisions, comme le stade de maturité de la relation en question ou encore le cadre relationnel établi de commun accord.
Dépassée la fidélité ? Pas pour 85% des Liégeoises et des Liégeois
Des écarts dans la vie de couple que nos répondants justifient avant tout par un sentiment de lassitude, de désintérêt et d’ennui et l’envie de briser la routine. Vient ensuite le manque de communication au sein même du couple, qui peut pousser une de ses moitiés à aller voir ailleurs si l’herbe n’est pas plus verte. En troisième position, on retrouve enfin le manque de confiance en soi, et le besoin de plaire et d’être vu.e.
Quelles sont les principales raisons qui peuvent pousser à l’infidélité ?
- « Ne plus croire en l’amour éternel et véritable. Le manque de spontanéité. L’ennui et la distance »
- « Le fait qu’on change et que le partenaire ne corresponde plus entièrement à nos attentes »
- « Un manque de sérieux dans la relation dès le départ »
- « Le manque de dialogue. L’ennui et les soirées smartphone/Netflix. Les soucis, le deuil »
- « La peur de vieillir »
- « L’alcool et les stupéfiants »
- « C’est comme le marché. Dès que ça ne va plus, on abandonne et on va sur une application pour rencontrer quelqu’un d’autre. Les gens ne se battent plus et ne communiquent pas assez. Ils pensent qu’il y a toujours mieux ailleurs et donc ils veulent tester ailleurs »
- « Frustration émotionnelle ou sexuelle »
- « Ne plus être amoureux »
Enquête réalisée par Clément Jadot & Kathleen Wuyard. Visuels réalisés par Pauline Gillard. L’enquête « Grosse baise » a originellement été publié dans le numéro #7 du magazine SIROP paru en décembre 2023 (www.siroplemag.be).
Lire aussi :
