
Mais au fond, qui était donc le Cavalier Fonck?
Entre monuments, caserne, rues et places, le Cavalier Fonck est partout à Liège, tant et si bien que son nom en serait presque venu à être désincarné. Pourtant, derrière ces lieux communs, se cache un destin hors-du-commun, qu’il est bon de rappeler. Alors, qui était donc le Cavalier Fonck?
De prime abord, de lui, on sait qu’il aimait le cheval, ou du moins, qu’il se déplaçait (parfois) sur une fidèle monture. Mais aussi, s’il faut en croire la quantité de lieux qui portent son nom à Liège et ailleurs, qu’il est doté du don d’ubiquité. Il est partout, mais aussi nulle part à la fois, car qui sait encore à qui le nom de la caserne Fonck rend hommage. Au Cavalier Fonck, certes.
Mais encore?
Né à Verviers en 1893 et mort à Thimister le 4 août 1914, le Cavalier Fonck est entré dans l’Histoire (et dans le patrimoine liégeois) parce qu’il n’est autre que la première victime belge de la 1e Guerre Mondiale.
Du Grand Bazar au front
Orphelin élevé par sa grand-mère, il n’ a que 18 ans quand il s’engage pour 3 ans dans l’armée belge en 1911, après un premier emploi de magasinier au sein du Grand Bazar, ancêtre de l’Inno à Liège.
Cavalier au sein du 2e régiment de lanciers, il quitte l’armée en mai 1914… Mais est rappelé dès juillet, guerre oblige. Il ne le sait pas encore, mais son engagement lui sera fatal, et dès les premiers soubresauts du conflit en Belgique, Antoine Fonck donnera sa vie pour sa patrie.
Selon les témoignages de l’époque, le 2 août 1914, le 2e régiment de lanciers reçoit l’ordre de quitter sa caserne.
Objectif: s’établir à Milmort, dans ses cantonnements de mobilisation, d’où le régiment doit mener des missions de surveillance de la frontière avec l’Allemagne. Le 4 août, le premier régiment, composé d’une patrouille de 4 lanciers, parcourt la route de Margensault lors d’une mission de repérage des activités de l’ennemi. Le Cavalier Fonck part au devant du groupe, quant à proximité de la ferme de Bolsée, un fermier lui signale avoir aperçu un groupement suspect.
La 1e victime de la Grande guerre
N’écoutant que son courage, Antoine Fonck va au-delà du danger, et réalise rapidement qu’il s’agit de soldats prussiens. Il descend donc de sa monture, qu’il attache à une barrière, épaule son fusil, vise… Et touche un soldat ennemi. Le reste de la troupe se disperse, et le Cavalier Fonck remonte à cheval, mais les Prussiens, qui appartenaient au 5e régiment de Uhlans, contre-attaquent.
Première tragédie: le fidèle équidé du jeune soldat est mortellement touché. C’est donc à pied que le natif de Thimister continue sa fuite, mais il ne va malheureusement pas bien loin. À 10h du matin, il succombe en effet au lieu-dit de la Croix Polinard, mortellement touché d’une balle dans la nuque.
En tout, ce sont environ 41.000 de nos compatriotes qui sont morts au combat durant la Première Guerre mondiale, mais l’Histoire se souvient tout particulièrement des noms de certains d’entre eux, dont le Cavalier Fonck, donc, qui a « l’honneur » d’être la première victime belge de la Grande guerre.
Du Cavalier Fonck au Caporal Terfve
Outre les nombreux lieux qui portent son nom, sa ville natale, Thimister, lui rend hommage chaque année le 1er dimanche du mois d’août.
Hasard ou coïncidence? Le dernier soldat belge tué lors du conflit était également né en 1893 et venait lui aussi de la région liégeoise. De Liège même, d’ailleurs. Il s’appelait Marcel Toussaint Terfve, et avant que la guerre n’éclate, il exerçait la profession d’inspecteur d’assurances.
Membre du 1er régiment de ligne, il a passé les quatre ans de la guerre dans les tranchées, et a notamment combattu lors de la bataille de l’Yser et de la chute de Dixmude. Le
Les soldats ont été prévenus à 09h qu’un cessez-le-feu aurait lieu dès 11h, mais malgré l’imminence de l’arrêt des combats, un nid de mitrailleuses est toujours active sur la rive droite du canal. À 10h42, trois soldats, dont Marcel, sont fauchés par un tir de mitrailleuse. Et si ses deux compagnons d’infortune, grièvement blessés, y survivront, notre Liégeois, lui, a reçu une balle dans le poumon gauche, et succombe à ses blessures à 10h45, un quart d’heure seulement avant la fin de la guerre.
Curieusement, et malgré le tour cruel que celle-ci lui a joué, le nom de Marcel Toussaint Terfve n’est pas (encore?) entré dans l’Histoire. Ni bâtiments ni rues ne lui rendent hommage, pas plus qu’à la grande majorité des victimes de cette guerre qui aura fait en tout 20 millions de morts nous direz-vous. Mais tout de même, si on rend hommage à Antoine Fonck, tombé le premier, son camarade d’infortune tombé le dernier ne mérite-t-il pas lui aussi qu’on commémore l’injustice de son décès?
À méditer…
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