
Bar Sauvage, le laboratoire insolite de la Brasserie C
Si les noms de Curtius et de la Brasserie C résonnent déjà familièrement aux oreilles des Liégeois, celui du Bar Sauvage s’installe peu à peu, tant dans nos esprits qu’au cœur de l’Impasse des Ursulines. À deux pas de sa maison mère, ses bières éphémères aux saveurs inattendues ont trouvé un écrin où mûrir, grandir et séduire une clientèle toujours plus fidèle.
Brasser des bières avec du poivre de Kâmpôt, du pissenlit, du rutabaga ou encore de la tomate verte : une audace pour certains, une marque de fabrique pour Sauvage, la gamme inédite lancée par la Brasserie C en 2023.
Derrière cette idée un peu farfelue, l’envie d’explorer la fermentation de levures et bactéries dites « sauvages » afin de créer des bières acidulées (les fameuses sour). Mais sans venir bousculer leurs références déjà bien établies dans nos contrées comme la Curtius ou la Smash.
Avec Sauvage l’objectif est clair : expérimenter et s’amuser, tout en testant les limites des consommateurs.
Le Levure Lab
« Dès le début, l’envie était de faire collaborer l’ensemble de l’équipe à la gamme, se souvient Kerian Laverdeur, Responsable Relations Publiques de la Brasserie C. Nous voulions que tout le monde puisse présenter des recettes et apporter sa touche personnelle ».
Dans la gamme Sauvage, une bière peut naître de pas grand-chose : un ingrédient préféré, un souvenir de voyage, ou juste une envie subite. C’est ensuite aux brasseurs de trouver le bon équilibre afin de donner vie aux créations éphémères.
« L’expérience est totalement différente, explique Kerian, déjà parce que les levures et bactéries dites sauvages ont la fâcheuse tendance à contaminer les autres brassins, donc elles nécessitent un lieu à part. Mais aussi parce qu’on utilise des produits vivants qui comportent eux-mêmes des levures et des bactéries qui leur sont propres, donc on ne sait jamais comment cela va réagir ! Il y a un vrai côté laboratoire des expérimentations ». Ainsi, d’une bière à l’autre, d’un ingrédient saugrenu à un plus rassurant, les recettes ne sont jamais les mêmes.
« La crainte quand nous nous sommes lancés était de choquer en allant trop loin, en poussant trop fort les curseurs de goût. Mais, plus on avançait, et plus on se rendait compte que le public ne demandait que ça. La personne qui a l’audace de commander une bière au rutabaga, ils veulent le goûter ».
Une créativité qui semble payer puisque la gamme Sauvage compte déjà 14 bières différentes à son actif et ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. « D’ici la fin de l’année, nous allons encore organiser deux release party le 7 novembre et le 12 décembre afin de lancer nos éditions 15 à 18, se réjouit Kerian. D’ailleurs pour les plus impatients, celui-ci n’hésite pas à nous dévoiler les deux prochaines : « La première est une Berbère sour, inspirée des voyages au Maroc de Charlotte, notre déléguée commerciale. C’est une bière brassée avec des amandes, des figues de barbarie et de la fleur d’oranger. La seconde est une Forest sour aux bourgeons de sapin, donc assez en adéquation avec la saison ».
Comme leurs aînées, les créations numéro 15 et 16 de chez Sauvage seront produites en 2.000 exemplaires. Pas une bouteille de plus ou de moins !
« Pour nous, le caractère éphémère est vraiment important, car il permet à tout le monde en interne de s’exprimer sans avoir trop de bières qui cohabitent. Nous sommes attachés à l’idée qu’elles se succèdent une fois que leur “vie” est finie ».
Contenu travaillé, contenant soigné
Éphémère ne rime pas pour autant avec ordinaire. Chez Sauvage, on veut prendre le temps de faire les choses bien et avec soin. Ainsi, les bouteilles contenant leurs précieuses créations bénéficient d’une attention toute particulière.
« Elles sont non seulement sérigraphiées (impression directement sur la bouteille, NDLR), mais aussi cirées en interne par nos équipes. C’est un long processus, surtout en sachant que sur notre machine, les Sauvage sont embouteillées 4 par 4, ce qui prend environ une journée pour chaque nouvelle sortie de 2.000 exemplaires ».
Un choix qui peut sembler chronophage, mais qui a toute son importance, permettant à Sauvage de proposer un objet à part, qui donne envie d’être dégusté. « Le vrai souci avec ce design, c’est qu’on va bientôt arriver à court de tonalités de couleurs pour la cire, plaisante Kerian, mais on va continuer dans cette voie parce qu’on a envie de se faire plaisir et de faire plaisir aux clients ! »
Jeune bière recherche un lieu mortel
Avec le succès de la gamme Sauvage est née une nouvelle idée : lui offrir une véritable “maison”. Un lieu rien que pour elle, où elle pourrait se déguster et s’exprimer, indépendamment de la Brasserie C. Pour trouver cet écrin, il n’a pas fallu chercher bien loin ! Au pied des escaliers sinueux de l’Impasse des Ursulines, tout simplement.
C’est là, dans un ancien relais de poste, que le Bar Sauvage est né. « On désirait avant tout créer un cocon à l’ambiance chaleureuse et colorée. Tout le mobilier a été chiné sur des brocantes ou à la Ressourcerie dans cet objectif, sourit Kerian, quant aux tables, vous n’en verrez jamais des trop grandes, car des petites tables renforcent le côté convivial ».
Contrairement à la Brasserie C, le bar Sauvage n’a pas pour vocation principale d’accueillir des grands groupes, mais plutôt des petites tablées d’amis ou des couples. Une différence qui se poursuit dans la carte. « Les deux établissements sont complémentaires. On retrouve donc chez Sauvage davantage de boissons, comme des cocktails qui se marient bien avec l’ambiance recherchée, une sélection de vins plus importante et même des bières originales et innovantes d’autres brasseries craft ! »
Plus qu’un café, le Bar Sauvage se transforme aussi régulièrement en scène d’expériences et de rendez-vous variés. Une bonne manière de faire connaître l’endroit à un large public.
« Dans les récurrences, nous accueillons le Oufti Comedy Club une fois par mois, ainsi que la troupe d’impro des Otarires. Nous organisons des ateliers de dégustation, des live sessions assez intimistes ou encore des flash nights avec des tatoueurs, des bingos avec des Drag Queens, des karaokés, etc., continue Kerian. Tous ces événements permettent de faire vivre le lieu tout en mettant en avant des artistes liégeois. Et il faut croire que cela plaît, car on revoit souvent les mêmes têtes. »
Un bar (plus que) vivant, qui n’a pas non plus oublié son passé. En guise de discret clin d’œil à la fonction première de l’endroit, une boîte aux lettres est mise à disposition des clients. L’occasion pour eux de partager leur visite chez Sauvage avec leurs proches en Belgique voire au-delà de nos frontières. Une façon supplémentaire d’accroître la renommée de la gamme éphémère.
Une gamme éphémère partie pour durer
Forcément, face à ce succès grandissant, on pourrait être tenté de viser toujours plus loin (toujours plus haut, toujours plus fort). Cependant, Sauvage tient au caractère éphémère de ses bières, qui constitue une grande partie de son identité.
« Evidemment, c’est un projet qui a encore beaucoup à offrir et dont la notoriété peut encore être augmentée. Mais en même temps, nous avons aussi envie de garder ce projet un peu secret, temporise directement Kerian, le fait de proposer des bières temporaires permet à nos brasseurs de s’éclater et de tester des recettes. Partir sur une gamme fixe, comme à la Brasserie C, ne nous semble donc pas opportun. »
Cela ne veut pas dire pour autant que toute évolution est proscrite ! « S’il n’est pas question de toucher aux 2.000 exemplaires produits pour chaque cuvée, il n’est pas exclu que le format de la bouteille puisse changer. Actuellement, il est de 50cl et pensé pour le partage, mais si vous êtes tout(e) seul(e) et que vous voulez juste goûter, ce n’est peut-être pas idéal.
Nous allons également continuer nos collaborations, notamment avec les Vins de Liège, et pourquoi pas avec d’autres brasseries spécialisées dans les bières sours, détaille Kerian.
Enfin, nous avons à cœur de toujours mettre en avant l’artisanat liégeois. Ce côté liégeois, nous le chérissons et nous souhaitons le montrer le plus possible. Nous voulons créer des projets qui font briller notre belle Cité ardente. D’ailleurs, on pourrait faire appel aux Liégeois(es) pour élaborer les futures recettes. Le tout serait de bien cadrer pour conserver une bière buvable ! »
Dans tous les cas, une chose est certaine : « Sauvage est et restera la bulle de créativité de la Brasserie C. »
Plus d’infos :
Bar Sauvage
Impasse des Ursulines 3, 4000 Liège
Ouvert le mercredi de 17h à 22h, le jeudi et vendredi de 17h à minuit et le samedi de 14h à minuit
Site internet – Instagram – Facebook
Crédit photos : (c) Bar Sauvage/M. Radi