Quand un commentaire raciste fait dérailler Masse Critique Liège
La raison d’être du groupe Facebook Masse Critique Liège? Rassembler un nombre suffisant de cyclistes pour circuler dans la ville en sécurité. Parfois, aussi, dénoncer le manque de respect des automobilistes… Quitte à ne pas toujours le faire de la manière la plus respectueuse possible.
« Pour circuler en vélo dans la ville en sécurité, il faut atteindre un nombre suffisant de cyclistes, une masse critique. Cette masse critique de vélos va ainsi déterminer le flux du trafic et remodeler un nouvel espace urbain avec moins de voitures pour redonner la priorité aux vélos et aux transports en communs. Nous ne bloquons pas le trafic, nous sommes le trafic ! ». C’est en ces mots que se présente le groupe Facebook Masse Critique Liège à ses 2.266 membres. Dans les faits, on s’y exhorte à pédaler du bon pied, certes, mais on y poste aussi des photos de vélos dérobés, ainsi que des clichés volés d’automobilistes en plein manquement flagrant au respect des cyclistes, confondant piste cyclable et place de parking. Sauf que la dernière photo du genre passe mal, et suscite le débat auprès des membres.
Plus que la photo en question, qui n’est jamais qu’une réplique d’autres clichés pris sans le consentement (ni même, la connaissance) des automobilistes, c’est ici la légende qui dérange. Si le voile qu’on aperçoit sur la tête d’une des protagonistes laisse en effet supposer sa confession, le cycliste mécontent prend la peine de le préciser dans la légende, et pour certains utilisateurs, ça passe mal.
« Commentaire raciste qui n’a rien à faire ici », « stigmatisation ratée et plutôt malvenue », « raciste et irrespectueux ».
Sauf que tout le monde n’est pas de cet avis, et en face, le débat déraille. D’un côté, ceux qui soulignent qu’être musulman et acheter de la bière est antinomique, et mérite donc d’être souligné (commentaires probablement rédigés par des catholiques qui respectent le carême et mangent du poisson chaque vendredi). De l’autre, ceux qui crient à la sensibilité mal placée, car il ne s’agit après tout « que d’un fait correct et détaillé, il faut arrêter de crier au racisme pour un oui pour un non ». Sauf que si, en fait: petit rappel à l’intention de ceux qui l’ignoreraient, mais mentionner la religion ou l’ethnie d’une personne quand ce n’est pas pertinent, c’est une forme de racisme, et c’est d’ailleurs, pour info, totalement puni par la déontologie journalistique. Qui certes, ne s’applique pas aux commentaires sur les réseaux (ça se saurait…) mais fait toutefois office de ligne rouge intéressante à suivre lorsqu’on s’exprime en public. « Des connards d’automobilistes irrespectueux empêchent les cyclistes de se garer en paix », oui. Mais laissons la religion en dehors de tout ça: tout qui a pour habitude de se déplacer régulièrement à vélo en ville sait que l’irrespect dont les cyclistes sont victimes transcende âge, sexe et couleur de peau.
