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Soutien au commerce local liégeois DR

En achetant local, on investit dans le futur que Liège mérite

Avec son clin d’oeil à l’iconographie punk des 60s, la nouvelle campagne du commerce local peut prêter à sourire. Sauf que derrière, la problématique est bien plus grave que l’éternel débat commerce de proximité vs géants du web: mis à mal par les événements de ces derniers mois, le centre-ville est maintenu à bout de bras par les petits entrepreneurs locaux, qui ont besoin de notre soutien pour mener leur mission à bien. 

Une mission pour laquelle ils peuvent compter sur le soutien des instances politiques, la Ville étant partenaire de la campagne « Sans nous, pas de futur », mais qui ne pourra être accomplie que si chaque Liégeoise et chaque Liégeois y met du sien. Même si, clairement, en ce moment ce n’est pas toujours facile: on invite celui ou celle qui n’a pas opté pour la facilité de l’achat en ligne ces derniers mois à nous jeter le premier reçu payé en Valheureux, la monnaie locale, mais il ne s’agira pas d’un membre de l’équipe rédactionnelle de Boulettes Magazine, pourtant drôlement attachée à sa ville, laquelle est toutefois bien difficile à aimer depuis quelques mois.

C’est qu’avec la pandémie, les (re)confinements et la désertion du centre qu’ils ont entraînée dans leur sillon, les travaux interminables du tram, qui en creusent aussi pas mal, des sillons qui perturbent chaque mode de circulation dans une ville où Dieu sait que ce n’était déjà pas nécessaire et la recrudescence de l’incivisme face auquel les services de nettoyage font de leur mieux sans toutefois pouvoir être partout tout le temps, Liège est sale, désagréable, pénible, et c’est peu de le dire.

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La solution adoptée par nombre de locaux, découragés par les temps de trajets colossaux qu’il faut désormais pour relier un point A à un point B, pourtant pas plus éloignés de 500 mètres, en voiture, ou carrément dégoutés par le spectacle offert par certaines rues du centre, reparties comme en 40 ou plutôt comme au faîte de la déglingue des 80s, entre murs maculés d’urine, pavés garnis de crottes de chiens assorties et joyeux spectacle d’une seringue enfoncée dans un bras aussi furtivement que le fait de s’y adonner en plein jour et en pleine rue le permet? Acheter en ligne, pardi. Ou acheter ailleurs, dans un des conglomérats commerciaux qui poussent en périphérie, et dans lesquels, de la droguerie géante au magasin d’ameublement suédois en passant par la chaîne culturelle ou encore les boutiques de vêtements, chic alors, on peut trouver un cadeau de Noël pour toute la famille ET ceci avec des facilités de parking. La vie, la vraie.

Sauf que derrière, il y a des gens qui ne peuvent pas se permettre d’abandonner, eux. Parce que leur gagne-pain en dépend, parce qu’ils ont des factures et des employés à payer, mais aussi et surtout parce qu’à l’image d’une Emmanuelle Wégria en Souverain-Pont, d’une Catherine Fourneaux en Neuvice, d’une Lou Delchambre rue du Pont et de tous ces autres qui ne sont pas tous de sexe féminin mais Liège grouille de femmes de tête et on tient à le souligner, ont fait le pari un peu fou de s’implanter en plein-centre, dans des rues autrefois délaissées, et de tenter de les faire revivre.

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Pour que la crise ne soit pas fatale au local

« Les commerçants liégeois ont été particulièrement impactés par la fermeture de leurs enseignes et les retards engendrés dans les différents chantiers. Le retour à une situation normale semble encore loin.Cette situation est particulièrement difficile pour les nombreux commerçants liégeois, confrontés à ces difficultés et aux changements d’habitudes de shopping de leur clientèle » concède-t-on du côté du cabinet du Bourgmestre, lequel a travaillé main dans la main avec les commerçants et l’Echevinat du Commerce à une campagne de communication ayant pour but de « montrer à nouveau la solidarité de notre ville et de nous sensibiliser, en tant que consommateurs mais aussi comme Liégeois, à l’importance d’avoir un commerce local diversifié avec une véritable identité commerciale ».

Une identité de laquelle nous sommes tous acteurs: s’il est facile (et tentant) de se plaindre du fait qu’il n’y a plus que des chaînes dans le centre-ville, « et même pas qualitatives », il est plus simple encore d’inverser la tendance en investissant dans le changement qu’on veut voir arriver, c’est à dire en soutenant les commerçants indépendants ardents, et en se rappelant que la Ville n’a pas le pouvoir de refuser à des bailleurs privés de louer leur surface commerciale à une énième chaîne de burgers ou autre fast-food, mais que chacun et chacune d’entre nous a par contre le pouvoir de décision du lieu où il ou elle fait ses achats. Ce qui ne veut pas dire que la responsabilité échoit uniquement sur les épaules citoyennes, ni que les instances communales choisissent de (nous faire) croire qu’une campagne d’affichage suffira à inverser la tendance.

« Nous sommes bien conscients qu’une campagne de communication n’est pas l’unique réponse et nous continuons à travailler sur l’accessibilité et la sécurisation » – Ville de Liège.

Notamment, par le biais de l’organisation de patrouilles SURFINA (SURveillance de FIN d’Année) dans tout l’hyper-centre tout au long des journées du 10 décembre 2021 au 23 janvier 2022. « Et après? » La question mérite d’être posée, mais si on attend une réponse pour agir, il risque d’être trop tard pour certains commerces et les artères qu’ils contribuent à faire vivre. Du côté de l’Echevinat du Commerce, on sait qu’il n’y a pas une minute à perdre, et on assure qu’il est hors de question « d’attendre la fin des travaux du tram et la résolution de tous les problèmes habituellement pointés (travaux, mobilité, accessibilité, propreté, sentiment d’insécurité, etc.) pour faire (re)venir Liégeois et non-Liégeois en ville et augmenter leur fréquentation des commerces ». Par exemple, en y faisant vos courses de Noël. Même si c’est pénible de se garer, que vous allez probablement marcher dans au moins une crotte de chien et qu’en prime, contrairement au confort prodigué par le shopping par écran interposé, vous devrez porter un masque pour entrer dans chaque commerce. Parce que l’alternative, soit une ville morte, est bien pire. 

Journaliste pour Le Vif Weekend & Knack Weekend, Kathleen a aussi posé sa plume dans VICE, Le Vif ou encore Wilfried, avec une préférence pour les sujets de société et politique. Mariée avec Clément, co-rédacteur en chef de Boulettes Magazine, elle a fondé avec lui le semestriel SIROP, décliné à Liège et Bruxelles en attendant le reste du pays.