Réseaux de triche: le département de Philo de l’Uliège s’en prend à la Vice-Rectrice
Pandémie oblige, la session d’examens de l’Uliège aura eu lieu à domicile cette année, ouvrant la porte à ce que la Vice-Rectrice à l’Enseignement et au Bien-Être de l’université, Anne-Sophie Nyssen, a qualifié de « réseaux de triche » dans un courriel enflammé aux étudiants. Des accusations que réfute le département de Philosophie de l’Uliège, qui en profite pour apprendre quelques leçons de vie à la Vice-Rectrice au passage.
Dans son courrier adressé aux étudiants, Anne-Sophie Nyssen n’y va pas par quatre chemins: « L’analyse des copies permettra de retracer ce type de ‘collaborations’ et le règlement général des études et des examens prévoit des sanctions en cas de fraude qui peuvent aller jusqu’à l’exclusion. Nous appliquerons ces sanctions sans hésitation le cas échéant. Les jurys seront particulièrement attentifs lors des délibérations, à la fois aux effets des contextes difficiles, et aux possibilités de triche que certains ont saisies ». Des possibilités qui auraient notamment été exploitées par certains étudiants pour répondre à leurs questions d’examen « en réseau », les tricheurs présumés se concertant avant d’encoder leurs réponses en même temps, ce qui aurait éveillé les suspicions des autorités académiques… Qui n’ont toutefois aucune preuve tangible de ce qu’elles avancent, ainsi que le regrette le département de Philosophie de l’Uliège, qui s’est lui aussi fendue d’un courrier pour marquer clairement sa position sur le sujet.
Adressée à la Vice-Rectrice, la missive n’est pas plus tendre que celle de cette dernière et met les choses au clair.
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Rififi à l’Uliège
« Dans ce message, et par le fait même de votre fonction, vous vous êtes faite la porte-parole de notre institution et vous avez du même coup placé les enseignant-e-s et les jurys d’examen dans une situation très inconfortable qui nous contraint, enseignant·e·s du Département de philosophie de l’ULiège, à marquer nettement notre désaccord avec le contenu et les modalités de cette prise de position » souligne le département de Philo.
« Vous avez choisi de rédiger et d’envoyer votre message au milieu d’une session d’examens particulièrement éprouvante, du fait de la crise sanitaire que nous traversons, mais du fait aussi des conditions exceptionnellement difficiles et confuses dans lesquelles la session de juin a été organisée. Beaucoup d’étudiant·e·s ont été livré·e·s à eux-mêmes dès le 13 mars (…) et l’Université s’est trouvée dans l’incapacité de garantir des conditions d’examen égalitaires et ainsi d’assurer aussi bien la sérénité que la validité de la session ».
Les fameux « réseaux » évoqués dans le courrier d’Anne-Sophie Nyssen?
« En invoquant la « confiance », en pointant les prises de position critiques émises par certains étudiant.e.s, et en en accusant d’autres d’organiser la fraude, votre message, Madame la Vice-Rectrice, fait porter à l’ensemble de la communauté étudiante la responsabilité de difficultés d’organisation dont elle est en réalité la première victime ».
Et d’ajouter qu’en « choisissant d’adresser aux étudiant.e.s des menaces alors que la période d’examens bat son plein, vous prenez le risque de déstabiliser et d’angoisser un peu plus les nombreux étudiants qui jouent le jeu aussi honnêtement que possible, sans que ces messages risquent d’avoir le moindre effet dissuasif sur la minorité de fraudeurs »
« Que recouvre au demeurant la notion de « réseaux de triche » : l’usage du téléphone, le recours à la vidéoconférence, le piratage de données ? En décrétant dogmatiquement le passage au « tout virtuel », les autorités ont elles-mêmes créé une situation où il était inévitable que les étudiants chercheraient à accéder par les mêmes moyens à l’information leur permettant de réussir ».
Avant d’asséner le coup de grâce: « en invoquant le choix de l’ULiège de ne pas avoir recouru à la « surveillance intrusive à distance », vous avez laissé entendre dans votre argumentaire que cette option était bel et bien envisageable. Ce genre d’outil, utilisé ailleurs ces dernières semaines, n’a-t-il pas fait la preuve qu’il était un échec stratégique et déontologique? Pourquoi dès lors en agiter le spectre devant nos étudiant·e·s ? ». Et de remettre définitivement la Vice-Rectrice à sa place.
« Il est également difficilement acceptable que vous parliez au nom de jurys qui, jusqu’à preuve du contraire, sont souverains pour apprécier ce qui relève ou non de la fraude, et des modalités de lutte et de sanction contre celle-ci ».
Et le département de Philosophie de l’Uliège de préciser, au cas-où ce ne serait pas limpide à la lecture de leur missive, que les membres du département « refusent d’être associés à un discours qui, comme vous finissez par l’écrire, exprime avant tout votre « sentiment » ».