Plongeon au cœur de l’expo Fluctuations
L’architecture peut-elle réconcilier le fleuve et ses habitants ? Pour tenter de répondre à cette question, l’institut Culturel d’Architecture Wallonie-Bruxelles (ICA) vous invite à découvrir son exposition « Fluctuations ». Au 54 de la rue Feronstrée, là où votre œil affuté chassait les promos slips, chaussettes et loisirs créatifs chez feu Wibra, vous partez, du 6 mai au 6 juin 2022, pour une virée shopping d’une toute autre autre dimension.
Chaque année, l’ICA propose son action « Temps d’Archi ». Cet événement rassemble le temps d’un mois des installations, conférences, soirées, échanges et animations dans le but d’assurer la rencontre entre les acteurs de l’architecture en FWB et célébrer tous ensemble l’architecture et ses pratiques.
Depuis 2019, l’ICA a déjà proposé quatre Temps d’Archi aux titres plus qu’accrocheurs. Ainsi, selon eux, l’architecture « n’a peur de rien », à Namur en 2019, « jette des ponts » à Tournai en 2020, « vous veut du bien » à Namur en 2021 et enfin « monte dans les tours » à Charleroi. Cette année, c’est au tour de Liège d’accueillir le Temps d’Archi n°5 « Fluctuations », un grand livre ouvert qui raconte l’histoire de la cohabitation entre les Liégeois et l’eau, d’hier à aujourd’hui.
Muni de votre té et habillé de votre plus beau pull noir à col roulé et de vos lunettes rondes, venez, qui que vous soyez, réfléchir à l’avenir de la cohabitation architecturale entre l’eau et ses sirènes liégeoises, pour toujours et sans divorce. Parce que, comme Mylène Farmer le chante si bien, nous avons tous l’âme dans l’eau.
L’ICA : l’architecture en réseau et en rencontres
La raison d’être de cet institut est de créer et de développer un réseau culturel de référence de l’architecture en FWB. À cet effet, l’ICA décèle, analyse, médiatise et co-construit la culture architecturale propre à la FWB. Il met en valeur les projets qui permettent la construction d’un environnement bâti de qualité et le bien-vivre ensemble. Et comme l’architecture est l’affaire de tous, l’ICA se déplace partout en Wallonie et à Bruxelles pour rencontrer des acteurs du territoire. Il anime ce réseau par des expositions, visites, conférences et autres ateliers afin de créer un espace de rencontre entre les métiers de l’architecture, les citoyens et les donneurs d’ordre.
Cohabiter avec l’eau qui fluctue
Pas plus à propos que Liège pour parler des rapports complexes entre une ville et son fleuve. Si la statue d’Albert 1er et son phare sur l’île Monsin vous fait surtout penser à une scène version miniature du Seigneur des Anneaux par son impression de puissance, vous avez plutôt raison. L’inauguration du canal Albert en 1939 marque l’importance de l’eau comme outil de développement et de communication pour la ville, mais aussi la domination sur la Meuse, par un urbanisme rationnel et invasif. Après le drame humain, social et écologique que constituent les inondations de juillet 2021, se pose maintenant la question de la reconstruction selon une vision durable et de l’adaptation de l’architecture à la présence fluctuante de l’eau.
Le but est de pouvoir cohabiter avec l’eau en réduisant la vulnérabilité des personnes et des bâtiments dans les endroits potentiellement inondables.
Une action pour répondre aux questions
Dans l’exposition « Fluctuations », vous verrez des photos, des documents graphiques grands formats, des textes, des vidéos et des maquettes qui expriment les stratégies de réconciliation du fleuve avec ses habitants. En tout, neuf approches documentaires, sensibles, historiques et prospectives ou encore paysagères alimentent la réflexion et proposent des réponses.
Au centre de l’espace, place aux humains : le travail du journaliste Hugues Dorzée de la revue Imagine et du photographe Goldo documente la résilience des personnes touchées par les inondations au confluent de l’Ourthe et de la Vesdre, au travers de nombreux témoignages.
Le groupe d’ateliers de recherche (G.A.R.) Archives d’Architecture met ainsi en lumière la relation entre Liège et son fleuve par une sélection fine de documents écrits et de cartes. Sur un autre côté, les architectes et urbanistes Lucile Barcelo et Alban-Valérian Dumont présentent leur analyse des contextes topographiques, hydrologiques, urbanistiques et architecturaux des vallées de la Meuse et de la Vesdre d’avant les inondations.
Plus artistique, la vidéo Je suis Eau de l’architecte Paola Viganò fait dialoguer son rapport intime à l’eau, construit au fil de ses voyages, avec les projets européens de son studio d’urbanisme. Plus loin, l’installation Reclaim de l’association bruxelloise Rotor explore les conséquences matérielles et la gestion des déchets engendrés par les inondations de 2021, pour réfléchir à la façon dont notre société gère ses ressources.
Point de vue inspiration, le chercheur Frédéric Rossano présente une série d’initiatives menées en Allemagne, en France et aux Pays-Bas pour associer gestion des crues et projet de paysage. À la frontière entre l’art, le paysage et la prospection, le bureau d’architectes Baumans-Deffet et l’agence paysagiste-urbaniste Ter proposent avec Chateaux de la Meuse une fresque illustrant la transformation de quatre sites sidérurgiques liégeois à base de végétalisation et de totems industriels.
Du côté de l’agence pluridisciplinaire Taktyk, on explore le potentiel du risque d’inondation pour le transformer en support d’innovations paysagères. Et enfin avec le bureau d’architectes Martiat+Durnez, on réfléchit au projet surréaliste d’une maison unifamiliale conciliant milieu urbain et bord de fleuve.
Ensemble avec de nombreux partenariats liégeois
Avec l’aide d’Art au Centre, l’exposition participe à la dynamisation du centre-ville en utilisant un rez-de-chaussée commercial en reconversion mais également quelques vitrines pour présenter des projets issus du Prix de la Maitrise d’Ouvrage Publique. Mais le programme de Fluctuations s’étend à d’autres endroits de la ville et avec plusieurs partenaires, avec l’exposition Et Maintenant ? du photographe Michel Tonneau au centre culturel des Chiroux et avec des ateliers et débat au programme du centre culturel Ourthe-et-Meuse jusque début juin.
Plus d’infos
Vous aussi vous souhaitez alimenter votre réflexion et imaginer un futur loin des drames ? Alors rendez-vous en Feronstrée, n° 54 (entrée gratuite) ou sur le site de l’ICA (ici) pour toutes les dates des débats et conférences.
Crédit photos : © Frédéric Rossano (couverture), © Imagine x Goldo (Dominique Houcmant), © GAR-Archives d’architecture (ULiège), © Baumans-Deffet et agence Ter
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