Besoin de freiner: l’accident qui m’a sauvée
Un klaxon, un choc, une douleur. Même à du dix à l’heure, un accident fait peur. Pourtant, cette vitesse s’oppose carrément à mon mode de vie effréné et auquel je suis si bien rôdée. Je serais curieuse de savoir les raisons pour lesquelles arrivent la plupart des accidents non commis sous influence. Manque de pratique ? Inattention ? Stress extérieur ? Prise de conscience accidentelle, mais essentielle. Bienvenue dans nos vies à 100 à l’heure.
Fin novembre 2019. Depuis deux mois, ma vie avait changé du tout au tout et j’essayais tant bien que mal de dompter ce nouveau quotidien encore non apprivoisé. Bon, du tout au tout, c’est un peu exagéré, car en fait, j’avais juste changé de boulot, mais pour moi c’était tout. Je quittais un job secure que j’avais depuis deux ans pour me lancer dans la rude épreuve de devenir indépendant. Soyons clair. Je le dis et le redis : personne ne nous forme à un avenir professionnel (non-conventionnel), car prétendre que faire un bachelier équivaut à obtenir sa compta et permet de lancer son entreprise, c’est carrément de la mythologie.
Je n’étais pas prête pour cette nouvelle aventure et je le savais, c’est ça qui me stressait.
Foncer tête baissée
Existe-t-il des cours de confiance en soi ? Si l’on ajoute au tableau un manque de conseils chronique et de mon habitude à douter de moi, j’étais bien partie pour foncer dans le mur… Malgré les contraintes et la pression, j’ai appris néanmoins appris à me faire à cette nouvelle vie, mais il faut savoir que tout se fait par étapes et que chacune de ces étapes prend énormément de temps et d’énergie.
S’inscrire à un guichet d’indépendant, obtenir une carte de presse, faire les premières factures, faire appel à un comptable, apprendre à épargner, s’acheter une voiture…
Ah oui la voiture, parlons-en. À cette époque, je roulais avec la voiture de mon copain, ou celle de ma mère. Pas de chance, c’est sur lui que c’est tombé. Ça va faire huit ans que j’ai mon permis et j’avoue que depuis que je travaille à Bruxelles, mes aptitudes de pilote ont presque évolué jusqu’au niveau du boss final, car c’est pas une partie de plaisir la capitale.
La tête dans le guidon (bientôt dans le volant) sur le chemin du travail, me voilà prête à en découdre. Au programme : la rédaction de mes derniers articles et une réunion pour laquelle j’avais un tas de choses à mettre sur la table. Le temps ? Sec et ensoleillé. L’heure ? 09h30. L’endroit ? Le parking de Belle-île. Le coupable ? Une Renault Clio rouge.
Allez savoir pourquoi, ils faisaient des travaux le long du parking. Contrainte et forcée, je suis obligée de passer par le parking couvert et de ressortir au bout. Un petit détour qui, à priori, semblait absolument inoffensif. A l’horizon, j’aperçois un panneau stop. Je m’approche et je marque l’arrêt : à ma gauche, un (gros) casse vitesse, à ma droite personne. Je me lance en (re)regardant à ma gauche, car c’était le côté de la chaussée sur lequel j’allais m’engager pour tourner à droite et là, le trou noir.
RESET
Un klaxon, un choc, une douleur. Bon ok, heureusement, je ne dépassais même pas les 10km/h. J’ouvre les yeux et j’aperçois en face de moi une petite Clio rouge avec un mec qui a l’air d’avoir l’âge de Zack et Cody dans… La Vie de palace de Zack et Cody. Et oui, c’était lui au volant.
Réalisant sur le coup qu’un accident, ça n’arrive pas qu’aux autres et que je n’étais désormais plus protégée par le Dieu du Klaxon, j’ai repris mes esprits et je me suis mise sur le côté.
Je sors. Le mec en face a l’air vachement sûr de lui, même si pour lui aussi, c’est visiblement une première. Ce qu’il a retenu ? Il venait de droite, rien ne pouvait lui arriver. Prouver la vitesse à laquelle il roulait ? Il me dit avoir vu le danger arriver (moi en l’occurrence), mais pourquoi ne pas s’être arrêté ?
Bilan du sinistre : une Clio mise hors d’état de nuire et la Mini de mon mec quasi indemne, véritable reine du ring avec à peine sa plaque d’immatriculation avant à terre. Encore une preuve de la vitesse excessive de mon assaillant ? Il dément. Il vient d’avoir son permis et, à mon avis, papa ne va pas être content. Mon homme arrive et moi je pleure. Le père Clio arrive et Renault reste calme. On règle tout ça à l’amiable, sans intervention de la police, et au final, ce sont les assurances qui payent.
Ce que je retiens ? J’ai eu un accident avec la voiture de mon copain et le mec qui m’est rentré dedans, en plus de venir de ma droite, est né en 2000. Y a-t-il un FAIL plus royal que ça ?
Le soir même, je dois aller chez le médecin, car j’ai une douleur à la nuque qui se répand dans mes épaules et jusque dans le bas de mon dos. Il me demande : « c’est ton premier ? » et je réponds que oui. Il me dit : « c’est normal que tu sois traumatisée, il va te falloir un peu de temps pour te remettre physiquement et mentalement ». Bon, on ne parle pas encore d’accouchement, loin de moi de faire un quelconque parallèle entre mon Mini accident et le fait « merveilleux ET douloureux » de mettre quelqu’un au monde, mais il y a une chose en commun : il y a une première fois à tout.
Anyways, après quelques jours (voire semaines) de remise en place de ma tête sur mes épaules, j’ai pris du recul et me suis rendue compte qu’en fait, même si je ne suis pas l’entière responsable de ce qui m’est arrivé, au moment de l’accident, j’étais en train de réfléchir à tout ce que je devais faire : au boulot, mais aussi en rentrant, au week-end… Perdue dans mes pensées, j’étais trop occupée par le fait de remplir une to do list mentale qui en plus de me causer du stress, m’a coûté une Mini commotion et de beaux dégâts matériels.
Stop. Je devais me reprendre en main. Ok, j’ai plusieurs boulots en même temps Oui, je joue sur plusieurs fronts et je veux assurer, mais je ne suis pas un robot.
Je dirais que cet accident, qui ne pouvait clairement pas me tuer, m’a sauvé la vie. Je me suis remise en question et j’ai compris que c’était bien d’être multitâche, mais que la charge mentale pouvait mener à l’autodestruction. Et même si mon niveau de vigilance n’était pas à son maximum en raison de la lenteur des choses et du faux sentiment de sécurité que procure un parking, cette surcharge m’avait dépassée et m’avait clairement mise en danger.
Depuis, j’ai décidé de faire UNE SEULE chose à la fois. De me concentrer sur chaque action que j’entreprends et de ne pas me laisser dépasser par les événements. La vie de mon mec quoi. J’ai appris à prendre le temps et à faire les choses correctement. A vivre autrement et ce dans tous les domaines. Finalement, qu’y a-t-il de plus important qu’un mode de vie productif mais apaisé ? Fini le multitasking destructeur. C’est clair, cet accident m’aura appris à lever le pied.
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