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Un étudiant de l'ULiège s'en prend aux siens DR Boulettes Magazine

« Mollusques devant Netflix », la carte blanche d’un étudiant de l’ULiège dérange

Victimes collatérales d’une crise sanitaire qui n’en finit pas de s’éternise, les étudiants du supérieur voient cursus et examens bousculés par les différentes mesures prises pour tenter d’endiguer le COVID-19. Des mesures qui ont un impact direct sur leurs études, mais aussi sur leur santé mentale. L’un d’eux, étudiant à l’ULiège, a poussé un cri du coeur dans une carte blanche pour « La Libre » dont la formulation pose question. 

Félix Katikakis, étudiant en Romanes à l’ULiège, lit « Le Monde » et tient à ce que ça se sache puisque c’est ainsi qu’il commence sa carte blanche intitulée « Etudiants, l’heure n’est pas aux lamentations mais à la réflexion et à l’action ». C’est qu’il en a marre, Félix, et il le dit sans détours, parce que « s’adapter, ce n’est pas se planter comme un mollusque devant Netflix et attendre que ça passe ». Et peut-être bien que dans son cercle d’amis, c’est l’approche que certains ont choisi d’adopter, voire même qu’il s’agit-là de l’échappatoire de nombreux étudiants du supérieur, dont il semble difficile à croire que l’étudiant de l’ULiège fasse véritablement partie.

Car le ton de sa carte blanche, donné d’emblée, ressemble plus à celui des boomers qui, depuis le début de la crise, condamnent voire moquent ces « jeunes » accusés allègrement de propager insouciamment le virus, la faute à une forme d’apathie générationnelle mâtinée d’égoïsme. Et pourtant, Félix Katikakis est bien placé pour savoir à quel point la situation pèse à ses congénères, car entre deux lectures du « Monde », il y est directement confronté. « Étudiant-moniteur depuis un an et demi, j’ai moi-même été confronté à la détresse d’étudiants de première année qui ne parviennent plus à donner un sens à ce qu’ils font et n’ont personne pour les soutenir, n’ayant pas eu assez de temps en septembre-octobre pour tisser des liens avec leurs condisciples » explique-t-il, avant d’asséner le coup de grâce.

« Notre génération va mal. Notre génération est au bord du gouffre. Pourtant, que fait notre génération ? Dans le meilleur des cas, elle se perd en gémissements et en supplications ; dans le pire, elle se tait et s’enferme dans son cocon de solitude. Aucune de ces voies n’est la bonne. L’heure n’est pas aux lamentations. L’heure est à la réflexion et à l’action »

Au-delà de la généralisation douteuse, boomeresque à souhait, l’approche pose question par son déni total de l’impact mental de la situation, pourtant mis en avant par le romaniste de l’ULiège, qui cite une étude de la FEF d’octobre dernier, révélant que  » 60 % des étudiants se disent en décrochage et 10 % envisagent d’arrêter leurs études ».

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Un étudiant de l’ULiège en croisade contre les « mollusques »

La psychiatre Dominique Montchablon, cheffe de service de la Fondation santé des étudiants de France, citait pour sa part en novembre dernier les nombreux facteurs de stress auxquels les étudiants doivent faire face: « inquiétudes pour leur santé ou celle de leurs proches, des tensions familiales quand ils ont dû retourner vivre chez leurs parents, un sentiment de solitude quand, à l’inverse, ils se sont confinés seuls », sans compter les angoisses quant au suivi de leurs études, et à ce qui les attendra après, leur remise de diplôme étant promise à coïncider avec une crise économique d’une ampleur dont les experts annoncent qu’elle pourrait surpasser celle de 2008.

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Certains étudiants choisissent-ils d’y faire face en effectuant une stratégie de repli, voire même en se pliant en boule devant Netflix? Peut-être. Mais là où l’étudiant de l’ULiège voit des « mollusques », ce comportement semble plutôt alerter de la gravité de l’impact psychologique de la situation sur une génération sacrifiée, qui voit son travail scolaire réduit à peau de chagrin, sans véritable perspective d’avenir une fois le retour aux amphis autorisé.

Si s’adapter consiste en effet à « chercher des solutions pour continuer à vivre tout en protégeant les autres » ainsi qu’il le souligne, la première solution à trouver serait celle au mal-être qui s’est emparé de toute une génération, quelle que soit la manifestation de ce dernier. Sans jugement, mais avec compassion et empathie, car ainsi que Félix Katikakis le rappelle, il s’agit d’être « raisonnables et responsables ». Et cela commence par éviter de pointer du doigt une partie de la population déjà bien trop victime de généralisations injustes.

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